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Droit du travail

Les mauvais résultats sportifs d'un entraîneur, un motif de licenciement pour faute grave ?

par
Adeline ESTEVES
le
9/22/22

Depuis quelques jours, le nom de Massimiliano Allegri est sur toutes les unes sportives en Italie : après plusieurs défaites avec la Juventus, son départ semble proche et pourtant, il ne se sent pas menacé. Le technicien a signé un contrat jusqu'en 2025 avec un salaire net de 7 millions d'euros. Ainsi, en cas de départ anticipé, la Juventus devrait donc signer un chèque de 36 millions d’euros.

Les mauvais résultats sportifs d'un entraîneur représentent-ils un motif de licenciement pour faute grave ?

Nous le savons, la spécificité du domaine sportif a contraint le droit du travail à créer le contrat à durée déterminée spécifique, pour les sportifs et entraîneurs (article L. 222-2-3 du Code du sport). Ainsi, le droit du travail a donc évolué avec la complexité du sport mais il reste pointilleux sur ses dispositions protectrices quant à la rupture anticipée du contrat, et le contrat à durée déterminée spécifique n’y déroge pas.

L’article L. 1243-1 du Code du travail pose les cas de rupture anticipée du contrat à durée déterminée :

  • La faute grave ;
  • La rupture d’un commun accord ;
  • La force majeure ;
  • L’inaptitude

L’insuffisance de résultats, en elle-même, n’est donc pas une cause de rupture anticipée, et encore moins une faute grave. En effet, la faute grave est le fait ou l’ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation délibérée des obligations résultant du contrat de travail, d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et nécessite la cessation immédiate du contrat de travail (Cass. Soc. 26 février 1991, pourvoi nº 88-44.908). Admettre cela revient donc à dire que les résultats sportifs sont une obligation de résultat du salarié or c’est impossible. Personne ne peut prévoir un résultat sportif, sauf les paris truqués mais ici, c’est un autre sujet 😉

Néanmoins, il existe une faille sur la volonté de l’entraîneur à ne pas remplir les conditions de son contrat de travail.

En effet, un club sélectionne un entraîneur pour perfectionner son équipe et si ce dernier ne respecte pas les conditions contractuelles posées, une faute grave peut lui être imputée. En d’autres termes, s’il est démontré que l’entraîneur ne s’est pas conduit en personne raisonnable en se soustrayant volontairement à l’exécution de ses obligations contractuelles, entraînant de ce fait de mauvais résultats sportifs, la faute grave est ici constituée.

Officieusement, il est très complexe de prouver cela donc pour un club, le meilleur choix restera toujours le commun accord pour rompre de manière anticipée le contrat avec son entraîneur.

Le droit français est très protecteur vis-à-vis du salarié, mais cela peut être différent dans d'autres pays.

D'après les informations du Bild, la direction du Bayern Munich serait prête à utiliser une clause secrète permettant de licencier aisément Nagelsmann. Simple rumeur ou réelle clause en défaveur du salarié ? L'avenir nous le dira.